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Contributions au congrès extrordinaire de 2018 - Contribution de Roger Moncharmont

Centrer notre activité politique sur le travail

Roger Moncharmont, section de Montpellier

 

 

Depuis l'analyse faite par Marx, les choses sont allées en s'aggravant : nos société se présentent comme une énorme accumulation de marchandises. Les marchandises sont la forme écrasante que prend le résultat du travail humain. Elles contiennent le surplus de valeur créé par l'activité humaine, en attente de se réaliser par la vente, et de retourner au capital en vue de son élargissement.

Pour autant qu'ils essaient, les détenteurs de capitaux ne peuvent pas s'éloigner longtemps de ce passage par l'activité humaine, et par les besoins sociaux, pour mettre en valeur leurs avoirs. Toutes les activités spéculatives, voire frauduleuses ou illégales, ne peuvent durer longtemps, et ne peuvent concerner tous les capitalistes (quelques uns tout le temps, ou tout le monde un court moment, mais pas tous les riches tout le temps). Sinon les sociétés s'effondreraient rapidement.

Donc pour l'essentiel l'appropriation privée du surplus de valeur repose sur les activités humaines engagées dans la production sociale.

Dans leur immense majorité les humains -séparés de leurs conditions sociales de production - doivent trouver acquéreur pour leur force de travail pour pouvoir subvenir à leurs besoins. Le cœur de la crise et de l'exploitation est que l'activité humaine doit passer sous les fourches caudines de la transaction d'achat-vente de la force de travail.

Ce qui nous constitue en tant qu'êtres humains formant société, i.e l'engagement de nos capacités dans des activités laborieuses et inventives, qui produisent nos moyens de subsistance et de développement en même temps qu'elles perfectionnent nos habiletés et nos savoirs, ne trouve à se réaliser que tout autant que des capitaux à la recherche de mise en valeur élargie ont intérêt à se placer. L'emploi capitaliste est donc une construction sociale, calibrée par les besoins de rentabilisation des capitaux.

Dans ce carcan, les humains ou bien travaillent sous des contraintes de plus en plus étrangères à leur humanité (santé, développement, dignité, sociabilité..), ou bien se trouvent excédentaires (chômage, sous développement).

Et pourtant ils travaillent, ils produisent, ils obtiennent des résultats utiles à la fois pour eux et pour la société. Les trains roulent, les lettres arrivent, les maisons sont construites, les aciers sont fondus..

Pour les maîtres du capital, ce qui compte c'est le capital et les forces productives matérielles qu'ils peuvent acheter avec lui. Le travail est perçu comme un aléa, un complément accidentel et malheureux, temporaire. Ils rêvent d'usines sans humains. Ce rêve ils tentent de nous l'imposer, imprégnant les façons de penser et de sentir des travailleurs eux mêmes, pour que ces derniers se considèrent comme surnuméraires, porte-douleurs de tâches subalternes et morcelées, potentiellement remplaçables par la machine. Les progrès de la numérisation donnent des couleurs à ce rêve : capital plus robots, ça pourrait suffire selon eux, les humains sont destinés à l'excédent, ou aux petits boulots concédés par la bonté du capital.

Pourtant ce n'est qu'une vaste illusion : il suffit d'ouvrir les yeux pour voir l'activité humaine qualifiée, compétente, sachante, derrière chaque objet,  et chaque service. Et il en sera toujours ainsi, c'est assez bête à dire, tant c'est évident.

Le défi aujourd'hui est le suivant : la forme juridique (le droit ne doit être ni surestimé ni sous estimé : « « il habille » les rapports sociaux dominants, il leur donne la forme qui leur permet de fonctionner) du contrat de travail, telle qu'elle a évolué sous le poids des luttes sociales, leur est devenue insupportable. Ils veulent « supprimer le salariat » à leur manière, en créant une nouvelle fiction de travailleur indépendant, entrepreneur de sa propre activité. En jeu : les énormes quantités de valeur qui alimentent les caisses d'assurances sociales.

 

Je résume : dans ce monde de marchandises, où les humains,  de manière immensément majoritaire, doivent vendre leurs capacités pour pouvoir s'engager dans une activité laborieuse, la voie révolutionnaire conduisant à de tous autres rapports sociaux (travail associé et libre) est obstruée si nous ne portons pas l'essentiel de nos efforts sur le travail, sur l'activité humaine laborieuse, sur ce qui se joue dans les lieux de travail. Dès que nous sommes « de l'autre côté », du côté de la consommation, de ses vertiges et illusions, nous sommes perdus, à la merci, transformés en spectateurs, victimes de toutes les illusions. Ce spectacle donne le ton aujourd'hui de toutes les autres activités et notamment l'institutionnel, la politique politicienne. Dans ce champ, leur pouvoir d'illusion est immense, il est impossible de le concurrencer.

Le seul endroit où on ne peut pas nous en compter, nous autres qui travaillons, qui engageons notre être dans l'activité laborieuse, c'est précisément au travail, car c'est précisément le seul endroit où nous en savons plus qu'eux, car nous sommes au contact des réalités, nous résolvons les problèmes, nous apprivoisons les aléas, nous gagnons de l'efficacité , nous perfectionnons les process.

 

Il faut donc appuyer l'engagement conscient des gens (nécessaire à la mise en mouvement de masses humaines déterminées, persévérantes et victorieuses) sur ce qu'ils connaissent, sur ce qu'ils maîtrisent, parce qu'ils savent la différence entre « ce qu'on leur demande » et « ce que ça leur demande », ils savent « ce qu'il leur en coûte », chaque jour et sur la durée d'une vie.

 

Je résume une fois de plus : je souhaite que nous centrions résolument notre activité politique sur le travail, sur la connaissance des activités laborieuses, sur la rencontre avec nos pairs qui travaillent.

Il convient de regagner la confiance et la fierté de ce que nous réalisons, nous les travailleurs de toutes conditions et professions.

Il convient par un dialogue en profondeur de dégager les conditions essentielles de notre humanité au travail, en termes de santé, de développement personnel, de dignité, de coopération.

Il convient de s'intéresser aux savoirs, aux sciences, aux technologies, aux organisations, reprendre possession collectivement de nos capacités et de nos pouvoirs.

 

Je propose donc d'ouvrir pour le prochain congrès une réflexion en profondeur sur ce que signifie être le parti du travail, le parti des travailleurs, celui qui connait le mieux les activité humaines laborieuses, leurs résultats et leurs conditions. Celui qui est le plus en osmose avec celles et ceux qui, dans l'immense diversité de leurs branches sociales et économiques, mettent en œuvre des capacités de tous niveaux, pour réaliser ce qui se réalise.

 

Quelle forme cela pourrait prendre ? Quel type de pratique politique, quel type d'organisation ? Quelles conséquences sur les autres secteurs de la vie sociale et politique ? Comment ordonner concrètement les priorités ?

Pour préparer le prochain congrès, je propose d'ouvrir un atelier de réflexion sur cette problématique et de mettre en réseau tous les groupes et collectifs communistes qui réfléchissent à cette question.

 

 

8 août 2017

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le 23 August 2017

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